everybody's trying to make us / another century of fakers (Belle & Sebastian)
"Nan, c'est une relation cool, sans prise de tête". A la vingtième fois que t'entends ça, tu t'dis que c'est plus qu'un hasard : la tendance du moment. Et puis, surtout, empiriquement, tu commences à mieux comprendre ce qu'ils entendent par là.
Soit, dans l'absolu, un truc super chouettos venu tout droit du pays des Bisounours ou d'une réclame de témoins de Jéhovah : on se comprend, on se respecte, on s'aimouille bien, on s'empiète pas, on crie jamais, on prend tout bien. Pour le meilleur et pour le pire, mais sans le pire. Genre pourquoi on n'y avait pas pensé plus tôt. Quelque chose entre la famille Ingals, les Barbapapa et un pack de flamby.
Dans la réalité, évidemment, tu penses bien qu'ils n'ont pas trouvé la formule magique comme ça. Donc, à bien y regarder, c'est légèrement plus glauque. On se tolère plus qu'on se respecte. On se raconte sa journée de boulot pendant deux plombes pour éviter les sujets à enjeux. On se baisouille un peu, pour être dans la norme, mais pas trop quand même, on n'est pas des bêtes hein. On se voit quand toutes les autres possibilités de sortie sont épuisées. Chacun reste sur ses positions, sur ses gardes. Et finit assez vite par s'en foutre gentiment ("alors que cet enculé qui m'a fait une rayure sur la Scénic, putain, si j'le chope !!")
Et puis bon, quand on ne "se prend pas la tête", généralement on ne se prend pas trop le cul non plus, ni le coeur (*), hein, oula.
Soyons désinvoltes, n'ayons l'air de rien.
Au moins, faut reconnaitre la lucidité de la démarche : le danger est clairement identifié. Parce que bon, c'est pas tous les jours qu'on voit rejaillir le feu de l'ancien volcan qu'on croyait trop chauve/cellulité. Par contre, deux cervelles au diapason, ça, ça peut durer. Durer ? Arg ! Le comble de la pas-coolitude.
En fait, une "relation cool", c'est comme si tu sautais le passage mouvementé (dont mains moites, palpitant à fond, neurones en vrac et priapisme figurent parmi les symptomes les plus visibles) pour passer tout de suite à l'étape finale, le vieux couple à la retraite, chacun dans un coin de la maison, à se croiser penauds devant Pernaut autour d'un Pernod, à réciter sa leçon en pilote automatique, en attendant que l'autre parte sans faire trop de bruit, les pieds devant ou avec le voisin.
Bon, dans quarante piges, je dis pas...
(Et encore)
(Ca n'a rien à voir, c'était juste histoire de caser un dessin de la douce Laurel)
(*) Beigbeder, citant moults amants célèbres et poitrinaires dans 99 francs, essai largement dispensable auquel on préfèrera par exemple L'amour dure trois ans ou certaines Nouvelles sous ecstasy, place plutôt le siège des sentiments au niveau des poumons, ce qui se défend. Personnellement, j'aurais proposé le bide, mais bon.
